On a inauguré en grande pompe le collège Katia Krafft de Vénissieux. Bâtiment dernier cri, potager pédagogique, panneaux solaires, équipements modernes… tout y est pour faire bonne figure. Mais derrière cette vitrine, une question dérangeante reste sans réponse : à quoi sert un « collège modèle » si les mêmes logiques de ségrégation continuent de s’y reproduire ?
L’absence du député Idir Boumertit en dit long. Celui qui se dit aujourd’hui sceptique n’a jamais exprimé la moindre réserve lorsqu’il siégeait comme adjoint à Vénissieux. Hier muet, aujourd’hui critique : il est plus facile de dénoncer à distance que d’assumer ses responsabilités au moment où les décisions se prennent. Ce double discours illustre un mal bien connu : certains élus, une fois perchés sur leur mandat national, adoptent une posture différente, presque déconnectée des réalités locales.
Pendant ce temps, sur le terrain, l’association No Ghetto se bat sans relâche. Elle le répète depuis des années : construire de beaux établissements ne résout rien si l’on ne s’attaque pas de front à la question de la mixité. Et elle voit venir le danger : un collège flambant neuf dans un quartier stigmatisé, face à France Travail, à deux pas d’un café marqué par un fait divers sanglant… les familles les plus mobilisées n’y enverront pas leurs enfants. Elles fuiront vers le privé. Résultat ? Un collège « ghetto », malgré 37 millions d’euros investis.
L’affaire met en lumière un décalage criant : d’un côté, des institutions qui investissent 37 millions d’euros dans un bâtiment exemplaire ; de l’autre, des acteurs de terrain qui dénoncent l’absence de stratégie réelle pour garantir la mixité sociale et scolaire.
L’avenir de Katia Krafft dépendra donc moins de ses panneaux solaires ou de son potager que de la capacité collective à briser les logiques de ségrégation. Faute de quoi, ce joyau architectural pourrait bien devenir le symbole d’un énième renoncement politique.

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